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Un baiser et Charon devient la lune de Pluton


Une équipe de chercheurs en astronomie a mis en avant, grâce à une modélisation numérique, un nouveau mécanisme de capture d’astres par collision, appelé « capture par baiser ». Selon eux, ce serait ce phénomène qui serait responsable de la mise en orbite de la lune Charon autour de la planète naine Pluton.

L’hypothèse la plus largement admise aujourd’hui concernant la formation de notre Lune correspond à l’impact d’un objet de la taille de Mars, nommé Théia, avec la Terre. Cette collision aurait projeté une grande quantité de débris en orbite, qui auraient fusionné par la suite pour former la Lune. Des chercheurs américains se sont penchés sur le cas de la planète naine Pluton avec l’une de ces 5 lunes, et auraient découvert un tout autre scénario.

Pluton et Charon sont aujourd’hui classées dans la catégorie des objets transneptuniens massifs en système binaire (c’est-à-dire deux corps astronomiques de nature et de taille similaires). Leur histoire commune interroge encore les astronomes qui cherchent à comprendre comment Charon a pu devenir la lune de Pluton. Pour ce faire, les chercheurs, qui ont publié l’article dans la revue Nature Geoscience, ont modélisé numériquement la capture de Charon en incluant la discipline de résistance des matériaux. Selon eux, un nouveau mécanisme qualifié de « capture par baiser » s’est déroulé lors de l’impact des deux objets, empêchant leur fusion en un seul et même astre.

Un baiser, une danse et une séparation

Les chercheurs ont effectué plusieurs simulations pour comprendre comment ces deux astres d’un diamètre très proche (1 200 km pour Pluton et 600 km pour Charon) ont pu se placer en orbite l’un autour de l’autre. Selon eux, c’est une collision qui l’aurait permis, mais pas n’importe laquelle. Généralement, les collisions s’effectuent d’une manière que l’on qualifie « hit-and-run », pour « frappe-et-fuite » : deux astres entrent en collision puis s’éloignent. Ici, grâce à leurs modélisations, les chercheurs ont découvert un nouveau mécanisme qu’ils ont nommé « kiss and capture », pour « capture par baiser », plus adapté à la situation, et qui est cohérent avec le système binaire actuel entre Pluton et Charon.

Cette « capture par baiser » a pu s’effectuer en suivant plusieurs critères. D’une part, la vitesse d’impact de Charon sur Pluton était plutôt faible (1 km/s), l’angle de la collision était d’environ 45° et les deux astres suivaient un même sens de rotation (on parle de mouvement prograde). Les collisions plus rapides et/ou plus rasantes ont tendance elles à devenir des « frappe-et-fuite ». D’autre part, les deux astres avaient une certaine résistance qui a permis leurs survies. « La résistance limite la déformation et réduit la pénétration, de sorte que, les corps restent distincts et principalement intacts après la collision, tournant comme une binaire de contact. » décrivent ils en effet. Les deux astres ont ensuite tourné ensemble quelques heures avant de se détacher, tout en restant en orbite l’un autour de l’autre, si bien que Charon est ainsi devenue une lune de Pluton.

Série temporelle imagée de la potentielle capture par collision de Charon

Par ailleurs, ce modèle pourrait être adapté à la formation de la plupart des systèmes binaires de la sorte.

Des conséquences sur la géologie des astres

Selon les astronomes américains, cette capture a eu plusieurs effets sur les deux astres. Bien qu’ils aient été presque totalement épargnés par l’impact (une faible perte des masses), celui-ci a néanmoins entraîné un resurfaçage de Charon et d’une grande partie de Pluton, c’est-à-dire une remise à zéro de la géologie de surface (qui peut être visible aujourd’hui). Par ailleurs, les scientifiques mettent en avant la potentielle formation d’un océan en profondeur due à l’augmentation des températures des astres pendant et après l’impact •


Rédigé par François Terminet.

Image : Vue d’artiste de Pluton (en bas à droite) et de Charon issue des images prises en 2015 par la sonde New Horizons de la NASA. Source : NASA/JHUAPL/SWRI

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