Un papillon australien utilise les étoiles pour atteindre son lieu d’estivation à 1000 km


Une équipe de biologistes a remarqué qu’un papillon d’Australie, le Bogong, se servait des étoiles et du champ magnétique terrestre pour se diriger lors de son vol migratoire. Ces deux repères, qui lui servent de boussoles, laissent d’ailleurs une trace visible dans son système neuronal.

Chez les êtres vivants, le lieu de naissance ne rime pas toujours avec lieu de vie, voire même pas du tout. C’est le cas du Bogong, un papillon australien, qui parcourt plus de 1000 km au printemps après sa naissance. Plus précisément, après son éclosion, ce papillon va fuir les fortes chaleurs du sud-est de l’Australie pour rejoindre des grottes plus fraiches dans les Alpes australiennes au Nord pour son estivation. Ce n’est donc pas vraiment un « lieu de vie » car ici le papillon va y séjourner dans un état de repos léthargique, mais cela pour une bonne partie de son existence, soit pour 3 à 4 mois. À l’automne, lorsque les températures redeviennent plus clémentes, le papillon reprend sa route vers le sud, se reproduit, puis meurt. Ce cycle migratoire touche des milliards de Bogong chaque année. Au-delà d’un comportement héréditaire, ces papillons semblent avoir créé un véritable système « GPS », grâce au ciel étoilé et au champ magnétique terrestre, pour rejoindre un lieu qu’ils n’avaient auparavant jamais rencontré. C’est en tout cas ce que montrent les résultats d’une étude publiée en juin 2025 dans la revue Nature.

Un simulateur de vol migratoire

Aucun invertébré n’avait été identifié jusqu’à présent comme utilisant le ciel étoilé pour s’orienter sur de longues distances. Les humains (et les oiseaux) ne semblent pourtant pas être les seuls à le faire, puisque des chercheurs ont récemment découvert que le papillon australien Agrotis infusa, communément appelé Bogong, s’oriente lui aussi grâce aux étoiles pour effectuer son vol migratoire de longue distance [1]. En Australie, le ciel peut être particulièrement dégagé, ce qui offre une magnifique vue sur les constellations d’étoiles et la Voie lactée. Le Bogong s’en servirait en effet comme repères visuels.

Pour en avoir le cœur net, les biologistes ont capturé un certain nombre de papillons et les ont placés dans un simulateur afin d’étudier leur comportement. Au sein de ce simulateur, les papillons volaient en toute liberté et pouvaient par ailleurs jouir d’une vue intacte sur l’environnement extérieur. L’objectif était simplement de mesurer en continu les directions qu’ils prenaient dans un cadre le plus proche possible de la réalité.

Une cartographie stellaire

 « Tôt dans la nuit, les papillons étaient significativement orientés vers le nord, dans leur direction migratoire attendue. Lors d’un test 3 h plus tard, lorsque les étoiles et la lune s’étaient considérablement décalées, la même cohorte de papillons de nuit a conservé son orientation vers le nord. », est-il détaillé dans l’étude. En outre, les papillons avaient été séparés en deux groupes dans deux arènes distinctes au lancement de l’expérience. Lors de la deuxième phase, les deux cohortes ont été échangées d’arènes, de manière à éliminer d’éventuels points de repères.

Ces résultats permettent définitivement de conclure que, d’une part, les papillons s’orientent grâce aux étoiles et à la Lune notamment et, d’autre part, qu’ils conservent leurs trajectoires même après le mouvement des astres, engendré par la rotation de la Terre.

Une boussole magnétique

Le simulateur a permis également de montrer que dans des conditions nuageuses, sans possibilité de voir les astres, les papillons conservaient la même direction. Cela suppose que c’est ici le champ magnétique terrestre qui leur servait de boussole.

Le papillon Bogong dispose donc d’une boussole stellaire, grâce à la cartographie des étoiles, et d’une boussole géomagnétique, grâce au champ magnétique terrestre. Par conséquent, il peut conserver son orientation migratoire lorsqu’au moins une est disponible et est totalement désorienté en leur absence.

Enfin, pour corroborer leurs observations, les chercheurs ont procédé à des analyses neuronales sur les insectes. Ils ont observé que leurs neurones s’activaient d’une façon très spécifique suivant les directions empruntées, montrant ainsi que la cartographie du ciel étoilé était bel et bien codée dans leur cerveau •


Rédigé par François Terminet.

Image : Rainbow Beach, Queensland, Australie, Source : ©Dualiti.net

[1] Le papillon enchaine plusieurs longs vols de nuits successifs.

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