Certaines espèces de coléoptères pourraient-elles aggraver les feux de forêts ?


Des spécialistes en écologie ont récemment publié une étude, sur la revue The Ecological Society of America, montrant que les trous de certaines espèces de coléoptères pouvaient accentuer l’inflammabilité des bois morts en forêt. Par ailleurs, cela entrainerait de fortes émissions de CO2 dans l’atmosphère lors d’incendies.

La séquestration du CO2 par les puits de carbone terrestres est de plus en plus malmenée au fil des années. En effet, une étude datant de juillet 2024 avait montré que la hausse récente du taux de concentration en CO2 dans l’atmosphère était très certainement liée à une chute drastique des capacités de stockage des forêts en particulier. Outre les fortes chaleurs, les incendies affectent aussi grandement ces écosystèmes et jouent un rôle significatif dans la libération du CO2 stocké dans les arbres. Puisque le réchauffement climatique augmente l’occurrence et l’intensité de ces événements dévastateurs, il s’installe un véritable cercle vicieux. Des scientifiques néerlandais ont souhaité explorer davantage les conditions qui rendaient propice la formation des incendies de forêt. Selon eux, les cavités que certains insectes forment dans les bois morts pourraient affecter grandement leur inflammabilité. Une hypothèse jusqu’ici peu explorée…

Les DGB : fertilisants mais aussi allume-feu

L’étude s’est principalement tournée vers un certain type de végétaux morts : les débris ligneux grossiers (DGB) [1]. Ceux-ci sont importants à la fois pour la santé et le renouvellement des écosystèmes forestiers, ainsi que pour le stockage du CO2. Cependant ils représentent aussi une cible de choix pour les incendies et pour les infestations d’insectes (qui se multiplient également avec le réchauffement climatique).

Bien que l’impact des insectes sur l’inflammabilité des DGB ait déjà été exploré par le passé, les études se sont concentrées sur les scolytes (une sous-famille d’insectes coléoptères) et les résultats n’ont pas été concluants. Les écologues responsables de cette nouvelle étude se sont donc intéressés à d’autres insectes, aussi friands de ces bois morts, qui pourraient eux accentuer l’inflammabilité : les coléoptères xylophages [2], tels que le Cerambycidae et le Pyrochroidae.

Des trous radiaux pour une meilleure prise d’air

Deux essences de conifères typiques du Pays-Bas ont été perforées suivant des axes radiaux et longitudinaux pour imiter les galeries naturelles des coléoptères. Puis les échantillons ont été brûlés afin d’analyser divers paramètres liés à l’inflammabilité du combustible. Il en ressort qu’effectivement la présence de trous de coléoptères xylophages peut augmenter l’inflammabilité. Plus particulièrement, ce sont surtout les trous radiaux qui conduisent à une combustion lente, mais n’augmentant pas pour autant l’intensité du feu.

L’oxygène étant une variable cruciale pour l’inflammabilité du bois, celle-ci augmente « lorsque les trous étaient parallèles au flux d’air. » indiquent les chercheurs. « Même en tenant compte des influences de la densité et des fissures du bois, ces trous radiaux continuaient d’avoir un impact notable sur l’inflammabilité du bois mort. » poursuivent-ils. Par ailleurs, les chercheurs ont observé que cette combustion lente entraine aussi la libération de carbone. Les débris ligneux grossiers pourraient ainsi devenir de grandes sources d’émission (du CO2 stocké) pendant les incendies.

Les écologues émettent encore quelques réserves sur l’impact complet que peuvent avoir les trous de coléoptère xylophage. En effet, des études futures pourraient s’intéresser à l’accélération de la décomposition de ces végétaux (avec l’augmentation de la population des insectes) qui pourrait contrebalancer ce risque de combustion •


[1] Ensemble des souches, troncs et branches mortes qui jonchent le sol forestier

[2] « Coléoptères » qualifient les insectes qui possèdent des élytres pour protéger leurs ailes et « xylophages », ceux qui se nourrissent de bois.


Rédigé par François Terminet.

Image : Coléoptères xylophages

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