Publiée fin octobre 2025, une nouvelle étude slovaque offre une compréhension plus fine du comportement de la pollution lumineuse, en ville comme en zone rurale. Elle s’accompagne d’un modèle statistique capable de prédire avec précision l’intensité lumineuse artificielle dans diverses conditions atmosphériques et nuageuses. Celui-ci pourrait devenir incontournable pour mener les politiques environnementales à venir.
La pollution lumineuse (ou photopollution) qualifie toutes les émissions de lumières anthropiques nocturnes, qui entraînent des conséquences sur l’environnement, la biodiversité, la consommation énergétique et l’observation du ciel étoilé. En France, même si la réglementation donne des résultats satisfaisants, 72% du territoire terrestre atteignait tout de même des niveaux de pollution lumineuse élevés en 2023. À l’échelle mondiale, on estime qu’environ 80% de la population vit sous un ciel photopollué. La pollution lumineuse est aujourd’hui pourtant assez mal modélisée ou plutôt de façon incomplète, puisqu’elle ne prend généralement en compte que les ciels dégagés ou complètement couverts. Par conséquent, une équipe de chercheurs slovaques a souhaité créer une modélisation de la pollution lumineuse artificielle plus proche de la réalité en intégrant des couvertures nuageuses variables.
Le rôle des nuages
Les nuages ont une place importante dans la propagation de la lumière naturelle et artificielle de nuit, ce qui par extension affecte la luminosité générale dans un environnement. Par exemple, lorsque la pollution lumineuse est intense, les nuages amplifient généralement la luminosité, contrairement à un ciel dégagé. À l’inverse, sur les zones faiblement polluées par la lumière, la présence de nuages diminue la luminosité générale. La réalité du terrain n’est en revanche pas si binaire. En effet, les ciels peuvent être hétérogènes, constitués de nuages isolés ou d’une couverture nuageuse fragmentée.
Création d’un modèle avancé
« Afin de prédire la pollution lumineuse dans une atmosphère réaliste, nous avons développé un modèle de calcul de la luminosité artificielle du ciel nocturne sur une sphère céleste, prenant en compte la présence de différents types de nuages et leur fraction. », détaille l’équipe. Ce nouveau modèle avancé a ensuite été utilisé sur Žilina, une ville d’environ 80 000 habitants en Slovaquie, où la pollution lumineuse est modérée. Plusieurs scénarios y ont été testés : variation des distances par rapport à la ville, différents types de nuages et couvertures nuageuses, etc.
Une « zone de transition » floue
Le modèle créé par l’équipe slovaque confirme bien la tendance. Les résultats montrent qu’au-dessus de la ville, les nuages de basse altitude en particulier peuvent amplifier la luminance artificielle au zénith [1] jusqu’à 27 fois et l’éclairement horizontal jusqu’à 17 fois par rapport à un ciel dégagé [2]. Ces valeurs sont maximales plus les nuages sont bas et plus la taille des particules les constituant (aérosols) sont fines. Dans des zones plus denses que Žilina, ces effets peuvent être amplifiés davantage. En revanche, en dehors de la ville, les nuages semblent avoir l’effet inverse et réduisent la luminance artificielle au zénith.
Entre ces deux extrêmes, les chercheurs identifient une « zone de transition » où la luminance dépend fortement de la distribution des nuages. Une tendance générale est néanmoins difficilement identifiable dans cette zone.
Par cette étude, les chercheurs mettent donc à disposition des scientifiques leur modèle gratuit pour déterminer à n’importe quel endroit sur le globe les effets des nuages sur la luminosité, en particulier dans ces « zones de transition ». Couplé aux stations météorologiques locales, il peut fournir des prévisions plus précises encore sur ces mécanismes. Ce nouvel outil est un atout précieux pour mieux guider les recherches et les politiques environnementales. Il pourrait être affiné davantage dans le futur en y intégrant une cartographie précise de la configuration des lumières dans les villes •
[1] Point situé sur la sphère céleste à la verticale au-dessus d’un lieu donné sur la surface terrestre.
[2] L’éclairement sert de paramètre pour la lumière incidente sur une surface, tandis que la luminance décrit la lumière que cette surface reflète. Source : ERCO Savoir lumière
Rédigé par François Terminet.
Image : Chicago, Source : Jim Richardson, Nat Geo Image Collection



