Grâce à une nouvelle méthode d’analyse, une équipe de chercheurs chinois a montré que les pesticides pouvaient pénétrer l’intérieur des pommes. Selon eux, le simple lavage du fruit ne suffirait pas à prévenir l’ingestion de ces produits nocifs pour la santé humaine.
Une équipe de 6 chercheurs chinois, de l’Université agricole d’Anhui, a mis au point une nouvelle technique d’analyse de la répartition des pesticides dans les produits maraîchers. L’étude a été faite sur la pomme et s’est limitée à l’utilisation de 2 pesticides seulement. D’après leurs résultats, l’imaginaire collectif selon lequel le simple nettoyage à l’eau suffirait à éliminer les résidus de pesticides a été réfuté puisque ces derniers semblent pénétrer, sur quelques millimètres, la chair des pommes.
Pour information, une étude menée par Générations futures, publiée en février 2024, avait mis en évidence que 73,1% des fruits non bio (21 fruits testés) et 45,8% des légumes non bio (31 légumes testés) analysés entre 2017 et 2021 et vendus en France, présentaient au moins une trace de pesticide.
Épluchage plutôt que lavage
La méthode employée par l’équipe chinoise est la DRES (Diffusion Raman exaltée de surface). La spectroscopie Ramen combinée avec une surface métallique nanostructurée au contact de l’objet d’étude, permet de capter les vibrations des molécules et ainsi d’identifier la nature et la concentration des éléments. Cette méthode a cependant des limites que les chercheurs ont pu atténuer pour obtenir des résultats extrêmement précis (avec un facteur d’amélioration de 2,3 × 10 8 par rapport à la méthode DRES classique). Ils ont en effet couplé les nanoparticules métalliques à de la cellulose et du nitrate d’argent. « Cette étude intègre la dissolution de la cellulose, la régénération alignée, la synthèse de nanoparticules in situ et la reconstitution structurelle pour créer des membranes de nanoparticules de cellulose/Ag (NWCM-Ag) flexibles, transparentes, personnalisables et nano-rides. » est-il détaillé dans le résumé.
Les pesticides employés pour l’étude (et pulvérisés sur les pommes) sont le thirame et la carbendazime [1]. Il est important de noter qu’en Europe le thirame et le carbendazime sont aujourd’hui interdits pour un usage agricole. Pour reproduire les habitudes des consommateurs, les fruits ont ensuite été lavés à l’eau. Grâce à leurs analyses, les chercheurs ont pu observer que les pesticides pénètrent la couche de peau dans la pulpe du fruit à une profondeur d’environ 30 μm. Quelques résidus sont aussi présents en surface dans de faibles concentrations. Selon les auteurs de l’étude, le simple lavage ne suffirait donc pas à limiter le risque d’ingestion des pesticides. L’épluchage, lui en revanche, pourrait garantir une meilleure sécurité alimentaire.
Les auteurs précisent qu’au-delà des résultats préoccupants pour la sécurité alimentaire, cette étude « fournit une nouvelle idée pour la conception de structures nano-rides et l’élargissement de l’utilisation de la cellulose dans la sécurité alimentaire » •
Rédigé par François Terminet.
Image : ©istock
[1] Le thirame a été acheté auprès de Shanghai McLean Biochemical Technology Co. et le carbendazime auprès de Sinopharm Chemical Reagents.