En sept ans, la pollution aux microplastiques s’est fortement intensifiée dans le continent de plastique du Pacifique nord


Une étude, publiée le 19 novembre 2024, révèle que le continent de plastique continue de s’étendre. Ce constat est d’autant plus alarmant que la part des microplastiques augmente très rapidement depuis 7 ans. Les scientifiques suggèrent que l’accumulation croissante de ces éléments dans ces zones marines est majoritairement liée à une source externe de dégradation de gros éléments de plastique.

Surnommé « 7ème continent », le continent de plastique est un véritable désastre sanitaire et environnemental pour la planète. Ce « continent » est en fait composé de plusieurs zones marines, dispersées à travers le globe, qui sont recouvertes de plastiques et de microplastiques. On en compte 5, la plus grosse étant localisée au nord de l’océan Pacifique. Au total, ce serait plus de 1,6 million de km2 d’océan qui serait recouvert de plastique, soit la superficie d’un pays comme l’Iran ou la province de Québec. Depuis près d’une décennie, l’organisation à but non lucratif « Ocean Cleanup » s’efforce de récupérer ces déchets flottants en développant des technologies innovantes. Par ailleurs, elle mène aussi des enquêtes pour contrôler et comprendre l’évolution de la pollution dans ces zones [1]. Après sept années d’étude (de 2015 à 2022), les chercheurs ont observé une tendance inquiétante : la concentration massique de fragments de plastique de très petites tailles augmente à un rythme frénétique et plus rapidement que pour les gros objets. En outre, ceux-ci ne sembleraient pas provenir de la dégradation des plus gros déjà présents dans la zone, mais de plastiques anciens accumulés partout sur le globe depuis des décennies.  

Accumulation des plastiques de petites tailles

L’étude s’est tournée exclusivement sur le vortex de déchets du Pacifique Nord. En 2015, les dernières données estimaient à environ 79 000 tonnes, la quantité de débris plastiques flottants sur cette zone, dont ¾ correspondait à des éléments d’une taille supérieure à 50 mm. Grâce à la mise en place de nombreux dispositifs d’échantillonnage de pointe [2], les scientifiques ont pu mettre à jour les précédentes estimations sur la dynamique de la zone. Ainsi l’étude détaille que « le nombre moyen de microplastiques (0,5-5 mm), de mésoplastiques (5-50 mm) et de macroplastiques (50-500 mm) collectés, est passé de 960 000 à 1 500 000 éléments par km2, de 34 000 à 235 000 éléments par km2 et de 800 à 1 800 éléments par km2, respectivement, en sept ans. » Les mégaplastiques ( > 0,5 m) sont aussi passés de 3 à 8 éléments par km2 en 7 ans. De plus, au-delà du nombre, les concentrations massiques des micro- et mésoplastiques ont également augmenté passant respectivement à 4,3 kg/km2 et 10,4 kg/km2  en 2022, contre 1,7 kg/km2  et 1,4 kg/km2  en 2015. Dans les zones avec les plus hautes densités en microplastiques, appelées « hotspots », les concentrations ont également explosé : « 10 millions de morceaux par km 2 en 2022 contre 1 million de morceaux par km 2 en 2015 ».

Provenance des petits débris

Les résultats de l’étude suggèrent qu’une partie de l’accumulation des micro- et mésoplastiques est bel et bien attribuée à la dégradation des plus gros objets déjà présents sur la zone, mais elle est en fait assez maigre. En effet, les chercheurs estiment qu’entre 74 % et 96 % d’entre eux proviennent de sources externes. L’hypothèse principale retenue par les chercheurs correspond à la dégradation des plastiques (en microplastiques) accumulés depuis des décennies un peu partout dans le monde sur les côtes, dans les fleuves et sur l’océan, qui se sont ensuite peu à peu déplacés jusqu’au vortex. D’autres mécanismes peuvent aussi être responsables de cette augmentation, comme les interactions avec la faune par exemple. D’autres sont peut-être encore inconnus.

Les chercheurs souhaitent désormais se pencher sur les quatre autres vortex afin de comparer si les dynamiques sont similaires ou non. Bien qu’un comptage des objets et une estimation parfaite de l’ampleur de la pollution dans ces zones soient impossibles, l’étude a tout de même le mérite d’illustrer la dynamique alarmante dans ces continents de plastique. Elle permet en outre d’apporter du poids à la finalisation du traité mondial de lutte contre la pollution plastique d’ici la fin de l’année 2024 •


[1] Les déchets s’accumulent et sont pris au piège dans des gyres océaniques, qui sont de vastes tourbillons d’eau générés par les courants marins dominants.

[2] « 917 échantillons de chalut manta, 162 échantillons de méga-chalut, 74 relevés aériens et 40 extractions de systèmes de nettoyage provenant de 50 expéditions individuelles »


Rédigé par François Terminet.

Image : System 03 de Ocean Cleanup, Source : Ocean Cleanup

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